Pourquoi nous sommes devenus intervenants AA en milieu carcéral
Deux membres des Alcooliques anonymes témoignent des raisons qui les ont amenées vers ce service.
Coline** : les maisons d’arrêt de Grasse d’abord et de Nice ensuite, étaient très favorables à la présence des Alcooliques anonymes dans leur enceinte.
Mais il était, hélas, difficile de trouver des membres AA désireux de s’y rendre. Je me suis donc proposée. Je faisais des interventions en milieu hospitalier et me suis dit qu’il était important d’aller transmettre le message des AA à des personnes enfermées.
Nous sommes toujours bien accueillis. En tant que femme dans une prison d’hommes, je n’ai jamais eu à me plaindre d’un quelconque manque de respect.
C’est une expérience très enrichissante que de porter un message d’espoir dans un lieu d’enfermement. Beaucoup sont incarcérés pour les conséquences de leur comportement sous l’emprise de l’alcool. Ils sont très réceptifs et participent vraiment aux réunions. Nous les écoutons et ne leur posons aucune question sur les motifs de leur incarcération. Je sais que j’aurais très bien pu me trouver à leur place.
Je ne pense pas être moins émotive qu’une autre, mais les hauts murs, les lourdes portes et les gros trousseaux de clefs ne m’impressionnent pas. Lorsque je ressors, j’apprécie la chance que j’ai d’être libre.
En région Provence-Alpes-Côtes d’Azur, nous avons trois antennes d’information en milieu carcéral à Nice, Grasse et Toulon la Farlède.
Gabriel : Pour ma part, j’ai fait la route à l’envers. Je n’aurai jamais imaginé retourner en prison. Mes déboires d’ivrogne m’y avaient conduit plusieurs fois. Erreur de jeunesse ? Non, une sale addiction nommée alcoolisme. Je n’ai pas tué, pas volé, mais des délits répétés au volant et des comportements dangereux pour la société et moi-même.
J’étais étiqueté “délinquant récidiviste”.
A quarante ans, je découvre les Alcooliques anonymes dans un tribunal. Je vais dans leurs réunions, je m’identifie à eux et avec leur programme. Je me libère de l’alcool et de mon illusion, toujours déçue, de maîtriser ma consommation.
Depuis de nombreuses années je suis libre et responsable.
Un membre AA donnait son témoignage en milieux carcéral. Un jour il m’a proposé de l’accompagner. « <strong>Ah non ! pas en prison ! c’est trop me demander ! </strong>» puis après réflexion j’ai fini par y aller. J’ai compris que j’avais encore ma place en ces lieux. Que mon rétablissement pouvait servir aux autres. Je peux leur donner de l’espoir. Leur dire que c’est possible d’avoir une vie heureuse une fois libéré de l’alcool. Je connais leurs doutes et leurs souffrances, puisque c’étaient les miens.